C’est avec une certaine appréhension que le procès sur les massacres du stade du 28 septembre a repris ce lundi 6 février devant le tribunal criminel, délocalisé dans la Cour d’appel à Conakry. Avec les informations faisant état d’une grève en préparation de la part des gardes pénitentiaires et des chauffeurs affectés à la sécurité dudit procès, on redoutait en effet la perturbation de celui-ci. Mais à cette menace, le ministre de la Justice a apporté tôt une réponse cinglante. Aux revendications des agents, Alphonse Charles Wright a opposé des manœuvres de corruption dont certains voudraient profiter. Or, martèle-t-il, il ne sera pas question de tolérer ces manœuvres.

Les gardes et les chauffeurs réclamaient des primes. Mais ils étaient certainement loin de s’attendre à la réponse à laquelle ils ont droit ce matin de la part du ministre de la Justice et des Droits de l’homme. De fait, sur fond d’un discours de vérité, empreint de fermeté, il leur a coupé l’herbe sous les pieds. Le ministre commence par rappeler que tout au début du procès, l’Etat a mis à disposition 10 milliards GNF. 90 % de ce montant a été alloué à la sécurité du procès. Et pour la gestion des ressources dédiées à la sécurité du jugement, le ministre dit avoir mis en place des commissions à charge de lui faire des propositions concrètes. « La gendarmerie et la police m’ont parlé de 750 agents et 53 véhicules. Juste pour carburer les 53 véhicules, ça coûtait au département par semaine 300 millions GNF, sans compter les primes qu’on donne », souligne Charles Wright.

Mais le ministre fait une contre-proposition. « J’ai dit maintenant voilà comment ça se passe : Ce n’est pas parce qu’on a parlé de 750 agents qu’on doit tous les payer. NON. Ce sont ceux qui sont effectivement affectés ici (au procès) dans l’opérationnel qu’on paie. Deuxièmement, on me dit de carburer 53 véhicules. Est-ce qu’on voit ce nombre ici ? Ça veut dire que quand on sert le carburant, il sert à l’opérationnalisation ailleurs », déclare le ministre. Or, s’empresse-t-il de faire remarquer : « la police et la gendarmerie, chacune dispose d’un budget ». En conséquence, il prend une résolution : « Je ne vais pas mettre le carburant destiné au procès du 28 septembre et que ce carburant serve à d’autres fins ailleurs. Parce que quand l’argent finit, on dira ceci ou cela. L’argent destiné à la tenue du procès, ce n’est pas le ministre qui gère l’argent. Tout ça, c’est pour vous dire combien de fois, les gens sont sournois. Ils pensent que quand ils vont devant la presse raconter du n’importe quoi, c’est ce qui nous fera reculer. NON. Je ne paierai aucun franc tant que je ne vois pas clair », martèle-t-il.

Les gardes pénitentiaires ayant évoqué le fait que certains d’entre eux auraient déjà perçu de l’argent et que d’autres ne l’ont pas perçu, le ministre de la Justice promet de vérifier et éventuellement de sanctionner le responsable, un certain Gando. « M. Gando, vous avez une semaine, si on ne me dit pas quelles sont les personnes qui ont perçu de l’argent et à quelle qualité, je prendrai mes responsabilités. D’autres qui ont pris l’habitude de baigner dans la corruption, je les préviens : ça ne peut pas marcher. L’argent là, c’est l’argent du contribuable ».

Charles Wright en profite même pour envoyer un clin d’œil à Cellou Dalein, Sidya Touré et à feu Jean-Marie Doré qui avaient, chacun, perçu 2 milliards GNF au titre d’indemnisation. « Des femmes ont été violées, d’autres ont reçu 2 milliards voire trois milliards GNF, aucune d’entre elles n’a reçu un franc alors qu’elles sont victimes de ce pour quoi nous sommes là », tacle le ministre de la Justice.

OB