L’éducation civique est un enseignement donné notamment aux tout-petits dans le cadre du processus de leur apprentissage dans les établissements scolaires et éducatifs. Elle vise à inculquer aux apprenants les règles qui enseignent la vie en société et les valeurs fondamentales d’une République donnée, ainsi que toute norme édictée pour le bon fonctionnement d’un domaine d’activités bien défini.
Autrefois, en Guinée, les règles de bonne conduite étaient transmises tant dans les familles que dans les établissements scolaires (français et/ou arabe), ainsi que d’autres centres d’animation citoyenne. À cette époque, c’était l’ère d’une société plus ou moins pacifique où l’éducation Civique était une affaire de tous. Le respect des principes de bonne conduite régissant la société était de rigueur, et cela se traduisait notamment par l’engagement des parents qui y veillait comme de l’huile sur le feu. C’est pourquoi, il n’était pas rare jadis de voir un enfant se faire corriger par un aîné après qu’il ait commis une faute ce, malgré qu’ils ne soient pas un parent proche. Un adolescent qui demeure encore dans le cercle de l’éducation respectait et assistait toute personne notamment les plus âgées qu’il croisait sur son chemin.
Bien qu’elle se matérialise par des comportements civiques comme : l’altruisme, la courtoisie, le civisme et la conscience professionnelle…, l’éducation civique perd progressivement sa place dans notre habitude en Guinée. De nos jours, force est de reconnaître que ces normes sociales ont disparu sous le poids de la modernité et de la démission parentale dit-on. Aujourd’hui, chaque famille et chaque personne a son code personnel.
Dans les écoles (endroit où le ton du civisme est censé être donné), on voit la propagation des actes d’incivisme parfois sous le regard complice ou impuissant des enseignants et encadreurs. Mieux, comment comprendre que la matière ECM, la plus importante, enseignée au 1er cycle du secondaire, ait un coefficient 1 et une heure de cours par semaine dans nos concessions sociales. Quand les injures et toute sorte d’incivilité côtoient la craie et autres matériels didactiques dans nos concessions scolaires. Aujourd’hui, il suffit de faire une immersion sur les artères publiques, pour s’apercevoir du recul apparent du savoir-vivre du guinéen. Des sachets d’eau et toute sorte de déchets ménagers sont jetés sans gêne sur la chaussée.
Les gestes d’incivisme sont pour autant à prendre au sérieux, car ils sont contagieux et peuvent facilement s’étendre à toute une ville ou tout un pays. Il est donc nécessaire aujourd’hui de se donner un ensemble de règles pour pouvoir fonctionner en équipe dans une société paisible.
L’éducation civique, qui vise à former des citoyens responsables et engagés, est souvent considérée comme le fondement d’une société prospère et démocratique. Cependant, de nos jours, nous assistons à une démission collective de la part de la société civile, des parents et des autorités éducatives en ce qui concerne la promotion de l’éducation civile. Cette démission a des implications profondes sur la formation des futures générations et sur la santé globale de notre tissu social. Pourtant comme l’a dit Manon Cléroux, experte canadienne en éducation Civique : << En matière d’incivisme, mieux vaut prévenir que guérir ! Plus on attend longtemps avant d’y faire face, plus il est long et coûteux de redresser la situation. >>
La défaillance de la société Civile : La société civile, composée d’organisations non gouvernementales, d’activistes et de citoyens engagés, joue un rôle crucial dans la promotion de valeurs civiques. Cependant, de nombreuses organisations semblent se détourner de cette mission, soit en raison de pressions externes, soit d’un manque d’intérêt. Cette défaillance se traduit par un manque d’initiatives éducatives et de campagnes visant à sensibiliser la population aux enjeux civiques. Exemple, peu d’ONGs ou plateformes de la société civile s’intéressent au volet assainissement ou de curage des caniveaux dans l’élaboration de leur plan d’actions. L’organisation des journées éducatives dans les concessions par ces OSC constituerait un véritable levier pour la construction d’une société plus apaisée. Mais hélas !
L’implication limitée des parents : Les parents ont une influence significative sur le développement des valeurs civiques chez leurs enfants. Cependant, de nombreux parents semblent démissionner de leur rôle éducatif, souvent en raison de contraintes de temps ou d’un manque de connaissances sur les questions civiques. L’absence de discussions ouvertes à la maison sur des sujets tels que la citoyenneté, les droits civiques et les responsabilités contribue à la dégradation de l’éducation civique informelle.
Les autorités éducatives en retrait : Les établissements éducatifs, des écoles primaires aux universités, sont censés être des bastions de l’éducation civique formelle. Cependant, de nombreuses autorités éducatives réduisent souvent l’importance accordée à ces enseignements au profit de matières plus axées sur les performances académiques. Cette négligence crée un vide éducatif, laissant les jeunes sans les compétences civiques nécessaires pour s’engager pleinement dans une société démocratique.
Face à la démission des acteurs de la société civile, des parents et des autorités éducatives dans le domaine de l’éducation civique, il est impératif de trouver des solutions adéquates. La construction d’une société informée, engagée et respectueuse des valeurs démocratiques requiert une action concertée de la part de tous les acteurs impliqués. Voici quelques pistes pour remédier à cette démission collective et rétablir l’éducation civique à sa place centrale.
1. Renforcer l’engagement de la société Civile.
La société civile, acteur essentiel de la promotion des droits civiques, doit être encouragée à renforcer son engagement. Des campagnes de sensibilisation, des forums publics et des partenariats avec d’autres organisations peuvent contribuer à ranimer l’intérêt et à mobiliser les citoyens. Des initiatives de formation continue pour les militants de la société civile peuvent également renforcer leurs compétences et leur endurance dans la promotion de l’éducation civique.
2. Impliquer les parents comme partenaires Actifs.
Les parents doivent être encouragés à jouer un rôle actif dans l’éducation civique de leurs enfants. Des programmes éducatifs au niveau communautaire, des ateliers parents-école et des ressources pédagogiques accessibles peuvent aider à renforcer la compréhension des parents sur l’importance de leur rôle. Les écoles pourraient également faciliter des rencontres régulières entre parents et enseignants pour discuter des progrès et des défis de l’éducation civique.
3. Réformer les programmes éducatifs
Les autorités éducatives ont un rôle crucial dans la réforme des programmes éducatifs. Intégrer l’éducation civique de manière transversale tout au long du cursus scolaire peut contribuer à ancrer ces valeurs dès le plus jeune âge. Les méthodes pédagogiques interactives, telles que les simulations, les débats et les projets communautaires, peuvent rendre l’apprentissage civique plus engageant pour les élèves.
4. Favoriser les partenariats intersectoriels
La collaboration entre la société civile, les parents et les autorités éducatives est essentielle. Des partenariats intersectoriels peuvent permettre d’élaborer des initiatives communes, de partager des ressources et d’optimiser l’impact des programmes éducatifs. Des plateformes en ligne, des forums communautaires et des événements collaboratifs peuvent faciliter cette collaboration et renforcer l’efficacité des actions entreprises.
5. Utiliser les technologies de l’information et de la Communication (TIC)
Les TIC peuvent être un moyen puissant de relancer l’intérêt pour l’éducation civique. Des applications éducatives interactives, des cours en ligne et des plateformes de discussion peuvent rendre l’apprentissage civique accessible et attrayant. Les médias sociaux peuvent également servir de canaux pour sensibiliser et mobiliser la population autour des questions civiques.
Enfin, il est impératif de reconnaître et de remédier à cette démission collective dans le domaine de l’éducation civique. La société civile doit réaffirmer son engagement, les parents doivent prendre conscience de leur rôle crucial, et les autorités éducatives doivent rétablir l’équilibre en accordant une place essentielle à l’éducation civique dans les programmes scolaires. La construction d’une société civile active et d’une population éduquée civilement est essentielle pour assurer un avenir démocratique et prospère.
Boubacar Mansaré. Analyste indépendant