De toutes les crises qui hantent notre pays, la crise morale reste la plus forte, la plus profonde et la plus dévastatrice.

Elle touche toutes les strates, toutes les composantes de la vie de ce pays.

Elle est le cancer de notre pays.

Elle est le poison inoculé à ce peuple et à ses élites.

Aucune institution, aucune structure, aucune organisation, étatique, politique, social, civil n’y échappe.

Nous sommes un pays en manque de socle morale et en décomposition profonde, qui se contente d’exister sans avancer, de se mouvoir sans grandir.

Nous sommes un pays agonisant, tant nos rêves semblent inatteignables.

A force de mensonges et de dénis de réalité, nous avons réussi à faire de la vérité un péché intolérable dans ce pays et de nos mensonges des promesses sans lendemain.

A force de lâchetés, nous présentons nos démissions morales et intellectuelles comme l’expression d’un patriotisme et d’un pragmatisme incarnés. Foutaise !

Un pays qui a été transformé en une jungle, où chacun travaille en réalité pour soi, son clan et les intérêts singuliers y afférents.

Peu importe si le peuple n’a pas de quoi manger, ni se soigner. Peu importe si la jeunesse n’a pas de travail digne de nom, encore moins de formations de qualité.

Une jeunesse abandonnée à elle-même dans une profonde détresse.

Peu importe si nos droits et libertés sont sacrifiés.

Peu importe si nous avons un peuple en miette, manipulable et achetable à souhait, qui baigne dans une marée de haines diffuses et d’oisiveté suicidaire.

C’est la volonté de Dieu, nous dit-on.

Circulez, il n’y a rien à dire !

Finalement l’on se demande si le sort ne s’acharne pas sur ce pays non pas seulement parce que nous avons des mauvais dirigeants qui s’aiment plus que leur peuple et leur pays (cela est une banalité !), mais aussi parce que nous sommes, un peuple sans courage, sans ambitions, plein de vices, d’immoralités et de paradoxes.

Un peuple qui adule le mensonge et exerce la vérité… comme ses dirigeants !

Des autorités morales et intellectuelles qui ferment les yeux sur les injustices et tournent le dos à la justice. Comme nos dirigeants !

Une élite qui, face aux défis sociétaux s’est transformée en théoriciens de l’absurde et de l’asservissement volontaire.

Une société qui diabolise la liberté et enjolive l’aliénation…comme nos gouvernants !

Un système qui déteste l’excellence et le mérite en pactisant avec la médiocrité et la démagogie pathologique.

Un peuple qui fuit la réalité, refusant de l’affronter, et se réfugie dans les rêves chimériques….,comme ses dirigeants !

Nous sommes en réalité un peuple qui ne croit plus en rien, des dirigeants qui n’ont jamais crû en rien, ni en la démocratie ni en l’humanisme, ni à notre réelle capacité de relever les défis qui s’imposent à nous.

Pendant ce temps le triste quotidien nous expose aux instincts les plus bas et aux travers les plus immoraux et les plus destructeurs.

Nous sommes un drôle de pays qui est gangrené d’absurdités spectaculaires, de haines tenaces, d’ethnicismes vicieux et maladifs, de mensonges ravageurs , de cupidités mortifères, de lâchetés arrogantes, de médiocrités théâtrales, d’oisivetés légendaires, de jalousies stupides, de méchancetés pernicieuses, de lâches compromissions, de démagogies pathologiques, de tricheurs et d’imposteurs invétérés, de violences verbales et physiques nauséeuses, d’illusions et de chimères infantiles….et suicidaires.

Nous sommes un pays ridicule qui n’assume ni son passé, ni son présent, ni ce qu’il faut pour son futur respectable.

La comédie affligeante et mortifère reste notre sport favori avec un peuple inconscient et bestialisé en spectateur parfait.

Ces perversités sont entretenues par une culture et une psychologie sociales et politiques totalitaires, répressives et ethnicisantes, tant dans la société que chez nos gouvernants.

Ainsi, nos fausses exigences démocratiques faites à nos dirigeants sont sans effet, parce qu’ils savent qu’ils sont eux-mêmes les produits de nos vices les plus destructeurs et les plus détestables. Et Parce qu’ils savent que de démocratie on en a cure…en réalité !

La liberté, Parce qu’elle va avec la responsabilité, nous effraie.

La justice Parce qu’elle nous exige, nous révulse.

La vérité, Parce qu’elle nous concerne, nous offense.

La violence Parce qu’elle soumet, nous fascine.

» Nous sommes nos choix » disait J.P Sartre .

A défaut de sérieux, le cirque ambiant et la culture du mensonge sont devenus nos compagnons les plus fidèles dans ce pays.

En Guinée, les vérités morales et démocratiques universellement consacrées ne comptent pas.

Nous en inventons pour nous et nous avons la folle arrogance de penser qu’avec ça, nous serons un pays qui se relèvera dans le concert des nations.

Nous sommes un pays malade, qui se complaît dans sa maladie !

Nous sommes un peuple en souffrance qui se lamente sur le sort qu’il s’inflige lui-même !

Nous sommes moralement malades car nos gouvernants et notre peuple ont-renoncé à distinguer le bien du mal, la vérité du mensonge, le fort du faible, la justice de l’injustice, le justifiable de l’injustifiable, la liberté de l’aliénation, aidé en cela par une certaine « élite » assujettie à la compromission et à l’hypocrisie, renonçant ainsi à son sacré devoir moral et intellectuel.

Nous sommes politiquement malades, parce que nous avons en réalité tourné le dos à tout ce qu’il faut pour bâtir sérieusement une nation de libertés et de justice, en s’évertuant à tout faire pour rendre impossible l’émergence et l’existence effective d’un Etat de droit démocratique sérieux et responsable au service exclusif du bien collectif et de l’intérêt général.

 

Khalifa Gassama Diaby